Coproduire la ville durable en Méditerranée


La rencontre du réseau des opérateurs et aménageurs de la ville durable en Méditerranée s’est tenue ce mercredi 2 novembre dans le cadre de la Semaine économique de la Méditerranée sous le thème des « Villes méditerranéennes en négociation - projets urbains intelligents, villes low-tech et territoires urbains en transition ». 

img_4958Initié par l’EPA Euroméditerranée et la CDC dans le cadre du CMI de Marseille, ce réseau « informel » vise à privilégier la dimension opérationnelle afin d’instaurer un dialogue constructif entre bailleurs et opérateurs. Il a su construire une relation de proximité entre opérateurs de la ville méditerranéenne en rassemblant les principales opérations urbaines d’envergure de la rive sud.

 Le Réseau fournit une expertise pointue et actualisée sur l’évolution du métier d’aménageur. Il contribue à l’identification des besoins en matière de financement de la ville durable, en lien avec la multiplication des attentes des sociétés méditerranéennes en matière d’accès à la ville et de développement des territoires. Il veille à réunir acteurs institutionnels et financiers aux côtés d’aménageurs et opérateurs, dans une logique d’accompagnement de ces derniers dans la conduite des transitions urbaines, économiques, environnementales… sur les trois rives de la Méditerranée.

Depuis 3ans, cette rencontre est organisée dans le cadre de la Semaine Economique de la Méditerranée, ce qui « marque le bien-fondé de cette initiative » précise Christian Badaut, Directeur du pôle international à la Direction internationale de la Caisse des Dépôts et Consignations, sans oublier de mentionner que « chaque année, les discussions et projets sont différents et d’autant plus pertinents ».

L’objectif demeure de favoriser un dialogue et des échanges d’expériences entre différents acteurs méditerranéens sur la thématique opérationnelle et concrète que constitue le pilotage et la conduite de gr ands projets urbains. Cette année trois gr ands défis auxquels sont confrontés les aménageurs ont été soulevés. En plus des contraintes techniques et financières, ils doivent respecter les attentes des populations concernant l’accès à la ville, l’attractivité et la compétitivité ainsi que le changement climatique et la révolution numérique.

Des projets aux quatre coins de la Méditerranée

Willem Pauwels, Directeur général de Paris Sud Aménagement a détaillé les gr andes lignes du projet d’aménagement Paris Sud. Avec la gare de Massy TGV comme point d’appui, l’objectif consistait à redynamiser le quartier, « de réaliser un nouveau quartier avec des entreprises bien portantes, des commerces, un cinéma, un hôtel ou encore des écoles. L’idée était de travailler avec les propriétaires de manière de faire évoluer le territoire » explique Willem Pauwels. Initialement industrielle, la zone a évolué avec l’ouverture de commerces, de parcs, l’installation d’équipements de proximité, de bureaux ou encore la construction de logements. La volonté de départ de transformer cet environnement en territoire attractif satisfaisant les différents propriétaires et investisseurs, a donc été accomplie car « l’idée n’était pas de chasser les propriétaires et promoteurs mais de travailler avec eux à la valorisation de leur terrain » conclut Willem Pauwels.

Pierre-Arnaud Barthel, chef de projet développement urbain de l’Agence Française de Développement, a ensuite présenté un projet de requalification urbaine des zones informelles développé à Imbaba en Egypte. Il précise que « l’enjeu était de faire en sorte que toute la communauté égyptienne puisse accéder à un logement ». Le projet Imbaba, mis en œuvre dans la partie nord du Caire, « était basé sur le redéploiement de l’aéroport jusqu’alors inoccupé, l’amélioration de l’accessibilité ainsi que l’identification de parcelles privées libres afin de les réhabiliter en faveur de services d’intérêt commun » argumente Ahmed Darwish, Ministre égyptien délégué au Renouvellement Urbain et aux quartiers informels, de l’Habitat, des équipements et des communautés urbaines. L’idée était de faire évoluer les mentalités et d’avoir une approche adaptée par rapport à la taille du territoire disponible. Ce projet fût un tel succès que la ville informelle commence même à déborder au-delà des parcelles initiales, engendrant la création de nouveaux équipements tels qu’une nouvelle ligne de métro.

Emilio Martinez Vidal de la Ville de Madrid, a, de son côté,  évoqué « l’amélioration des flux de trafic dans la zone de Madrid ». Traversée par une rivière, la capitale s’est presque vue séparée en deux avec, la partie la plus pauvre d’un côté et la partie historique de l’autre. Pour unifier à nouveau la ville, les projets M30 et Madrid/Rio ont été développés en 2007. Le programme M30 avait pour objectif d’améliorer le trafic par la construction d’un tunnel de 35 kilomètres à 62 mètres de profondeur. A la suite de cette construction, un parc a été créé au-dessus de ce tunnel. Le parc a permis de « concrétiser la réalisation du projet initial du tunnel et de permettre aux citoyens d’enfin voir la finalisation du projet. Les citoyens allaient directement bénéficier du parc, c’est l’expression la plus claire pour eux de l’aboutissement de ces réalisations » détaille Ginés Garrido, architecte à l’agence Burgos & Garrido.

Le quatrième et dernier projet présenté était celui de la dépollution des côtes au nord de la ville de Sfax en Tunisie. La première phase du projet a permis la réhabilitation de 6 kilomètres de plage artificielle ainsi que la création de 420ha de terrains gagnés sur la mer. La deuxième phase du projet Taparura, encore en cours de réalisation, correspond à la mise en œuvre de la conception urbaine et environnementale confirmant l’adhésion de la ville aux principes du développement durable. Dans cette continuité, un redéploiement de l’espace réservé aux industries chimiques pour des activités portuaires non polluantes a été mis en place, accompagné d’un calendrier régulant le déplacement des unités industrielles installées sur le site. La globalité de ce projet prend en compte et vise une nette amélioration de l’accessibilité, de la qualité de la plage et de la baignade, de la faisabilité ainsi que de la rentabilité financière.

Ce programme a fait face à un double défi : celui de réussir à gr ande échelle un tracé des conditions et des constantes d’aménagement afin d’attirer des promoteurs, et en même temps réussir à commencer le travail à plus petite échelle pour lancer la machine.

Le numérique, un avenir mitigé ?

A la fin de cette plénière, de nombreuses questions ont été soulevées par l’assemblée : Pourquoi ne pas mieux répartir les populations sur les territoires afin d’éviter les zones fantômes et d’éviter les concentrations dans des villes géantes ? Les populations sont-elles réellement envie de se regrouper en un pôle attractif ? Quel rôle peut jouer le numérique ?

Willem Pauwels rétorque que « le numérique a tendance à effectivement conforter cette métropolisation » mais, en contrepartie, le numérique tend à faciliter le quotidien des populations.