Le blé, production-phare de la sécurité mondiale

Parti de ses travaux sur les enjeux agricoles et alimentaires en Méditerranée, Sébastien Abis, administrateur du CIHEAM, démontre à quel point le blé est un actif stratégique, et le bassin méditerranéen un centre de gravité géopolitique.

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Le blé, un enjeu géopolitique au pouvoir stratégique. Le blé, au cœur des rapports de force entre dominants et dominés. Le blé, facteur d’influence clef pour la diplomatie économique française. C’est sur ces idées que se fonde la réflexion de Sébastien Abis, administrateur du Centre International de Hautes Etudes Agronomiques Méditerranéennes (CIHEAM) dans son ouvrage « Géopolitique du blé, un produit vital pour la sécurité mondiale ».

Moins médiatisé que le pétrole et moins controversé que certaines matières premières, le blé ne bénéficie pas de la même notoriété. Et pourtant, il possède une « très forte charge géopolitique ». « Cultivé depuis des millénaires, le blé est à l’origine du développement agricole et de la naissance des civilisations antiques en Méditerranée. Cette matière première agricole, consommée chaque jour par trois milliards d’individus, est pourtant importante : banale pour les uns car abondante, obsession pour les autres car elle conditionne leur alimentation de base. Elle occupe une place centrale dans le commerce international agricole et est vitale pour la sécurité alimentaire mondiale. A la différence d’autres céréales, elle sert à 70 % à nourrir les Hommes », explique le chercheur associé à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). Pour lui « en posséder constitue un atout stratégique pour son influence internationale » et en manquer, « un point de forte vulnérabilité ». L'insécurité alimentaire motive souvent les conflits territoriaux.

Dans le cercle fermé (moins de 20) des pays nantis, la France, 5e producteur et 3e exportateur mondial (9,5 Md€ en 2014), a la chance de produire plus qu'elle ne consomme de blé. D’où l’autre gr ande idée développée par le chercheur : « à l’heure où la diplomatie économique devient un instrument au service de la compétitivité et de l’influence de la France dans le monde, il serait regrettable de ne pas intégrer le blé parmi les produits emblématiques ». Et ainsi d’en faire, en plus d’un outil commercialement performant, un levier géopolitiquement responsable en contribuant aux équilibres alimentaires (et donc à la stabilité) des pays méditerranéens. Ces derniers captent chaque année 35 % des importations mondiales de blé.
Sébastien Abis considère le blé comme « un excellent ambassadeur pour faire du multilatéral, du dialogue et de la coopération technique ». L’administrateur du CIHEAM donne comme exemple MED-Amin, un réseau méditerranéen d’information sur les marchés agricoles et céréaliers qui vise notamment à renforcer les capacités de production de ces pays.

*paru le 1er juillet chez Arm and Colin.
http://www.iris-france.org/publications/geopolitique-du-ble-un-produit-vital-pour-la-securite-mondiale/

Selon Sébastien Abis, administrateur du CIHEAM, le blé est un actif stratégique qui pourrait jouer un rôle dans la stabilité des pays méditerranéens.